Narcisse PELLETIER
Alphonse-Narcisse-Pierre Pelletier est né le 1er janvier 1844 à Saint-Gilles-sur-Vie de Martin Pelletier (Cordonnier-Bottier) et de Alphonsine Babin.. Narcisse embarque en 1856 aux Sables d'Olonne avant de rejoindre Bordeaux puis Marseille où il devient mousse sur un trois mâts en juillet 1857, le Saint-Paul. Après son naufrage en 1858 près de l'Ile de Rossel (Yela) en Nouvelle Guinée, l'équipage européen qui a subi l'attaque prolongée des insulaires, (le capitaine Pinard prend la décision de laisser sur un îlot plus de 300 chinois destinés pour les mines d'or australiennes et ceux-ci sont ensuite tués par les habitants de l'Ile de Rossel), s'est enfui en chaloupe. Endurant maintes épreuves, les marins traversent la Mer de Corail dans le Queensland en Australie, plus précisément dans le voisinage du cap Direction. Au cours d'une expédition pour chercher de l'eau, Narcisse Pelletier se trouve séparé de ses compagnons. La chaloupe repart sans lui, et le mousse s'y trouve abandonné pendant la saison de sécheresse.
Retrouvé prêt à mourir par une famille aborigène du peuple Uutaalnganu, un des groupes linguistiques des Pama Malngkana ou sandbeach people (gens des plages sablonneuses), il est recueilli dans leur clan, ou il est rebaptisé Amglo ou Anco, et menant la vie d'un jeune homme du clan, il y vivra pendant dix-sept ans. Narcisse Pelletier dit avoir été fiancé à une jeune fille beaucoup plus jeune que lui, mais nie, dans son récit "dix-sept ans chez les sauvages" publié sous la plume de Constant Merland (Docteur et savant Nantais) avoir eu des enfants.
En 1875, âgé de 31 ans, il est récupéré, contre son gré, sur le littoral, en face de Night Island, par un navire anglais qui y est mouillé, le John Bell. Le capitaine, Joseph Frazer, l'emmène à Sommerset, établissement de la colonie du Queensland d'alors, à la pointe extrême du Cap York. Le magistrat responsable de l'établissement , Christopher D'Oyly Aplin, ancien géologue, arrange le passage de Narcisse à Sydney sur un autre navire, le SS Brisbane, où le naufragé fait la connaissance du Lieutenant John Ottley des Royal Engibeers qui devient le protecteur et le guide de Narcisse lors de son voyage à bord du Brisbane. Ottley parlait français, ayant suivi une partie de sa scolarité en France, et donc en parlant avec Narcisse l'a aidé à retrouver sa langue natale, ce qu'il a fait avec une rapidité étonnante. Ottley a transcrit ses conversations avec Narcisse dans une lettre en 1923. Arrivant à Sydney, il est remis au Consul de France, Georges-Eugène Simon, diplomate et érudit. Narcisse Pelletier était tatoué par incision à la mode australienne. Ses oreilles étaient largement percées et le Ztigau mélanésien lui traversait la cloison nasale, selon le consul, il ne lui restait plus de l'homme civilisé que des souvenirs latents. le Consul essayait de l'interroger, mais Narcisse parut ne rien comprendre et resta insensible aux questions qu'on lui posait. Puis le Consul se rappela qu'il gardait au fond d'un tiroir des lettres d'une pauvre famille de Vendée qui chaque année, depuis dix-huit ans, écrivait au consulat pour demander si l'on ne pouvait pas leur donner des nouvelles d'un fils dont elle n'avait plus entendu parler. Le Consul prit une de ces lettres, et montra à Narcisse la signature en lui demandant si c'était son nom, une certaine expression d'étonnement se manifesta dans ses yeux, et il me répondit en faisant de la tête signe que oui. Le Consul continua à l'interroger lentement, doucement, en lui parlant à peu près comme on parle aux enfants, en lui rappelant le nom de sa ville natale, mais Narcisse faisait des efforts inouï pour se rappeler, il voulait parler mais ne lui venait aux lèvres que des sons inarticulés. Son visage et ses yeux exprimaient une inquiétude, une angoisse terrible. Il s'assit la tête dans ses deux mains, il semblait la fouiller pour y retrouver le souvenir dont l'absence le torturait. Puis tout à coup, il leva les yeux et apercevant sur la table du papier, il bondit, prit une plume et d'une belle écriture anglaise d'écolier qui n'écrit encore qu'en gros, il écrivit ses noms, le nom de son village, celui du navire sur lequel il avait fait naufrage et celui du capitaine de ce navire. Mais tout ne faisait qu'un mot, cela le calma et son visage s'anima d'une certaine satisfaction. il voulut immédiatement écrire à son père, mais ce qu'il écrivait n'avait pas de sens et de lui-même il s'en rendit compte. Le lendemain, il réussit à écrire à ses parents qu'il n'était pas mort, et qu'il ne les avait pas oubliés.
Rapatrié en France, via La Nouvelle Calédonie, il écrivit trois lettres à ses parents qui jusque là, le considéraient comme mort. Celui que la presse australienne surnomma "Le sauvage blanc" fait son retour en 1876 à Saint-Gilles-sur-Vie, ovationné par la population.
Il se marie le 18 octobre 1880 avec Louise Mabileau, ils n'auront pas d'enfants. Devenu gardien du phare de l'Aiguillon dans l'estuaire de la Loire, Narcisse Pelletier meurt en 1894 à Saint-Nazaire. Narcisse Pelletier avait du mal à se réadapter, comme dit constant Merland, ce n'était plus un français, c'était un australien.
Le récit que Narcisse Pelletier a laissé de ses aventures est un document précieux, non seulement en tant que témoignage des expériences extraordinaires qu'il a vécues, mais en tant que description ethnographique issue de cette région de la péninsule juste au moment où l'invasion Européenne y commençait, et qui a une grande corrélation à ce que les recherches ultérieures nous ont appris sur le mode de vie de ces tribus aborigènes.
La découverte et la capture de Narcisse Pelletier par l'équipage du John Bell ont fait grand bruit dans les journaux australiens et anglais, y compris le Times Britannique, en juillet et août 1875, avant d'être rapportées ensuite dans les journaux français. Puis il tomba dans l'oubli et on ne parla jamais de son retour en France.
BIBLIOGRAPHIE : Les Archives Départementales de la Vendée et Wilkipédia.